
En survolant le dernier communiqué de l'Autorité Nationale des Jeux (ANJ), personne ne s'attendait sans doute à prendre une telle claque. Il faut dire que les premiers paragraphes étaient plutôt classiques, et même emblématiques du flow habituel du régulateur : "Si la plupart des parieurs ont une pratique récréative et maîtrisée, l'objectif de cette campagne de prévention est de lutter contre les fausses croyances et de sensibiliser les jeunes joueurs aux conséquences du jeu excessif. Pour répondre à ce double défi, l'agence Rosbeef ! a imaginé la campagne « T'as vu, t'as perdu », dont l'axe créatif central est un son rap, mis en images par un clip".
Et la suite se révèle effectivement moins convenue, avec en point d'orgue ce clip qui étrille quelques slogans utilisés par les bookmakers ces dernières années. On en retiendra entre autres cette saillie digne des plus grands : "Tout pour prendre des euros, même à la daronne ouais gros". Une référence directe à la célèbre campagne publicitaire de Winamax, dont l'ANJ avait demandé le retrait en début d'année au motif que "les communications commerciales ne doivent pas associer la pratique du jeu d'argent et de hasard avec la possibilité de changer de statut social, de vivre des expériences hors du commun ou d'accéder à des services habituellement considérés comme réservés à des personnes très fortunées".
La suite de ce rap résolument moderne et incisif assène bientôt un véritable coup de massue : "Endetté pour 18 ans alors que t'as même pas 18 ans". L'auditeur n'en sort pas indemne et se pose bientôt une question : aura-t-on un jour droit à une battle digne de 8 Mile, avec d'un côté le patron de Winamax Alexandre Roos et de l'autre la boss de l'ANJ Isabelle Falque-Pierrotin ? On croise les doigts.
Des Français plus avides de paris : une étude en trompe-l'oeil
De ce communiqué, on retiendra aussi une étude Toluna – Harris Interactive assurant que 36 % des personnes comptant suivre la Coupe du Monde de football ont l'intention de miser de l'argent sur les matchs de la compétition. Un chiffre "en légère progression par rapport à celui exprimé avant l'Euro 2020 de foot (31 %)", mais qui ne révèle qu'une vérité partielle : seuls 38 % des Français déclarent en effet avoir l'intention de suivre le Mondial, contre 48 % en amont de l'Euro 2020. Or 36 % d'un panel représentant 38 % de la population, ça reste a priori légèrement inférieur à la référence de 31 % d'un panel en représentant 48 %. Un rapide calcul ramène ainsi à 13,6 % la proportion de parieurs potentiels dans la population d'ensemble, contre 14,8 % en amont de l'Euro.