Le rôle du médiateur des jeux est pour rappel assez bien défini : "rapprocher les points de vue [des joueurs et des opérateurs] pour ouvrir la voie à une solution amiable". Avoir recours à ses services requiert un préalable : s'adresser dans un premier temps par écrit à l'opérateur, puis se tourner vers le médiateur en cas de réponse non satisfaisante ou d'absence de réponse dans un délai de 20 jours. Le processus de médiation qui s'ouvre peut alors aboutir à une proposition de solution, mais sans le moindre effet contraignant.
Confronté à une très large majorité de demandes liées aux paris sportifs, le médiateur en a déclaré environ la moitié irrecevables en 2023. Dans près de 90 % des cas, cette irrecevabilité découlait de l'absence de réclamation écrite préalable auprès des opérateurs concernés. Veillez donc à respecter scrupuleusement cette étape si vous devez à l'avenir le solliciter.
Parmi les 754 dossiers recevables et donc traités, "environ un tiers des demandes reçoivent une satisfaction partielle ou totale". Le médiateur reconnait pourtant que dans 45 % des cas les demandes sont fondées. Ce différentiel s'explique très simplement : la proposition du médiateur "ne parvient à susciter l'adhésion des deux parties que dans un peu plus d'un tiers des dossiers en raison majoritairement d'un refus des opérateurs (89 % des cas)". Un constat qui inspire à Denys Millet ce commentaire : "C'est là une situation contrastant très fortement avec celle de la plupart des autres médiations de la consommation".
Parmi les nombreux exemples compilés dans le rapport (à partir de la page 37), le médiateur met en avant celui des griefs de fraude et notamment de partage de compte : "Certains opérateurs campent sur leurs positions en dépit du rappel fait par le médiateur de la nécessité de faire valoir des éléments de preuve précis pour justifier d'une annulation du ou des pari(s) voire des avoirs du compte joueur".
Ce sujet fait d'ailleurs partie des quatre recommandations formulées par le médiateur à l'attention des opérateurs :
- Procéder au remboursement du solde du compte joueur en cas de clôture du compte pour suspicion de fraude. "L'opérateur ne peut, de sa propre autorité, procéder à la confiscation du dépôt initial d'un joueur et, hors le cas d'une dénonciation effectuée à TRACFIN, l'opérateur doit rembourser au joueur le montant de son dépôt initial".
- Supprimer certaines clauses des CGU et règlements de jeu des opérateurs. "Les CGU prévoient que l'opérateur puisse annuler des paris en cas de prise de paris successifs sur une même sélection dans un court laps de temps. La disposition interdisant cette pratique parait licite. En revanche, la légalité de cette disposition fait débat dès lors que l'opérateur pourrait, à sa discrétion, annuler ou non ces paris selon leur caractère perdant ou gagnant."
- Informer les joueurs dans le cas de clôture du compte joueur pour inactivité. "Il serait souhaitable qu'au terme d'un délai de 11 mois, les opérateurs informent le joueur de la prochaine clôture de son compte en raison de son inactivité. Cette mesure permettrait également aux joueurs de se rappeler qu'ils disposent d'un compte et ainsi, d'effectuer les actions nécessaires : rejouer ou clôturer leur compte sans frais".
- Prendre des mesures pour prévenir le jeu excessif. "La mesure de suspension du compte, qu'actuellement les opérateurs retardent voire écartent de manière quasi systématique, devrait, selon le médiateur, intervenir dès que le joueur ne réagit pas aux messages de prévention, se dérobe à toute tentative de prise de contact ou encore modifie son comportement de jeu par une augmentation de ses dépôts et mises traduisant une perte manifeste de contrôle l'exposant à de fortes pertes".
Bien entendu, le médiateur rappelle aussi que les opérateurs ne se conforment pas toujours à l'interdiction de limitation des mises d'un parieur sans motif légitime. Le rappel à la loi de l'ANJ remonte pourtant à 2017, avec depuis une délibération datée d'octobre 2021 qui brandissait la menace de poursuites devant la commission des sanctions.
Sur ce point, le médiateur se montre néanmoins plus optimiste pour l'avenir : "Comme elle l'a annoncé dans son plan stratégique 2024-2026, l'ANJ entend intensifier son action répressive en amplifiant sa politique de contrôle. À cet égard, des actions de contrôle visant à vérifier la transparence dans les limitations de mise opposées aux joueurs sont au programme de cette année". À suivre...