Pour rappel, la médiation des jeux a pour objectif de "favoriser le règlement amiable des litiges qui peuvent survenir entre les joueurs et les opérateurs de jeux ou paris". Le recours au médiateur est ouvert à tous. Il peut être réalisé sur le site internet www.mediateurdesjeux.fr, par voie postale ou encore par courriel à l'adresse mediation@anj.fr. Dans les faits, le premier mode de saisine représente néanmoins plus de 95 % des demandes reçues.
Première précision importante et elle n'est pas nouvelle : "Avant de saisir le médiateur , les personnes doivent au préalable s'adresser par écrit à l'opérateur ; en fonction de la réponse obtenue ou en l'absence de réponse de l'opérateur dans un délai de 20 jours, elles peuvent ensuite saisir le médiateur". En 2022, 629 demandes adressées au médiateur ont été déclarées irrecevables (contre 744 recevables), ce qui représente un taux d'irrecevabilité relativement constant de 46 %. Et malheureusement, l'absence de réclamation écrite préalable auprès des opérateurs constitue de très loin (90 %) le principal motif d'irrecevabilité.
Denys Millet, le médiateur, regrette également le manque de développement des demandes. La plupart sont "exposées très brièvement" et "fréquemment lacunaires et mal renseignées sur des données essentielles telles que les dates et heures de l'évènement, ou l'objet du pari". Dans un autre registre, il pointe du doigt la mauvaise compréhension de son rôle par de nombreux joueurs :
Extrait de rapport d'activité du médiateur
Leur déception traduit une méconnaissance du rôle du médiateur qu'ils assimilent à un juge ayant la capacité de trancher un litige par une décision s'imposant aux parties voire y voient un « justicier » devant mettre fin à des « abus » des opérateurs. Il est ainsi difficile de faire comprendre aux joueurs que des allégations écrites doivent être assorties de justificatifs ou que le médiateur ne disposant pas de moyens d'investigation doit analyser les litiges, en fait et en droit, au vu des pièces produites par les deux parties soit spontanément soit à sa demande. Mais surtout, le médiateur doit, en réponse aux manifestations de mécontentement de certains joueurs, leur rappeler qu'il doit rechercher, au vu de son analyse du litige, une solution fondée en droit et en équité qui soit acceptable par les deux parties.
Pour le reste, on retiendra que les paris sportifs représentent 90 % des demandes et que l'ensemble des opérateurs sont concernés dans des proportions correspondant à peu près à leurs parts de marché respectives. Quant à l'issue des demandes ayant franchi l'obstacle de la recevabilité, elle peut diverger sensiblement d'un dossier à l'autre :
- 68 % des propositions du médiateur sont acceptées par les deux partie ;
- parmi les 32 % restantes, 72 % découlent d'un refus de l'opérateur et 28 % d'un refus du joueur.
Bien entendu, l'un des dossiers brûlants concerne le phénomène de limitation des mises par les opérateurs. Le médiateur précise que PMU (33 %), Winamax (19 %) et FDJ (19 %) concentrent 71 % des demandes relatives à ce sujet. "Ces litiges", poursuit le rapport, "font ressortir que ces opérateurs s'affranchissent des règles rappelées par l'ANJ dans sa délibération n° 2021-C-01 du 21 octobre 2021 essentiellement, en limitant les mises de joueurs dont ils considèrent que les pratiques de jeu représentent un risque financier pour l'opérateur. Le plus souvent, il s'agira de prises de paris sur des cotes anormalement basses ou de paris comportant des erreurs de cote".
À l'avenir, le médiateur recommande donc davantage de transparence de la part des opérateurs : "Outre l'établissement par chaque opérateur d'un référentiel définissant, par type de pari, nature ou localisation des compétitions, les paris susceptibles de faire l'objet d'une limitation de mise destinée à limiter l'exposition financière de l'opérateur, chaque joueur devrait, par une mention sur toute proposition de pari, être informé d'une éventuelle limitation de mise et de son montant avec une référence aux dispositions du GGU l'autorisant".
Autre dossier sensible : celui des demandes de retrait de fonds du compte joueur. "La fréquence de ces litiges pour quelques opérateurs amène à de sérieuses interrogations et pourrait appeler à l'ouverture d'enquêtes par l'ANJ", souligne le médiateur en tapant sur les doigts de Zeturf et GM Gaming. Le premier concentre près de la moitié des demandes sur ce sujet, avec parfois des "réponses tardives et évasives sur les motifs de l'absence de validation de ces retraits" et surtout "des propositions du médiateur sauf exception non suivies". Quant au second, plutôt discret par ailleurs en terme de part de marché, il génère près de 9 % de cette catégorie de litiges.