
L'année 2021 s'annonçait déjà comme un exercice record pour les opérateurs de paris sportifs, mais l'Euro de football a contribué à repousser encore un peu plus loin les limites. Un succès qui n'a pas été du goût de tout le monde néanmoins : début juillet, le député de la majorité Aurélien Taché adressait un courrier à la présidente de l'ANJ pour dénoncer les "abus publicitaires" des acteurs du secteur.
Le régulateur a déjà démontré ces derniers mois qu'il était sensible à cette question. Outre ses communications récurrentes auprès du jeune public, l'ANJ a en début d'année formulé un certain nombre de consignes à l'attention des bookmakers en matière de stratégies promotionnelles. Le document s'inquiétait notamment du "ciblage renforcé des jeunes avec le recours à des stratégies de marketing digital sur les réseaux sociaux Snapchat et TikTok". Surtout, il soulignait qu'il ne fallait pas "donner du jeu d'argent une image suggérant que jouer contribue à la réussite sociale".
À l'époque déjà, les équipes d'Isabelle Falque-Pierrotin avait invité les opérateurs à la réalisation de plusieurs ajustements :
- évaluer a priori les risques présentés par leurs communications promotionnelles, puis les réduire voire les neutraliser ;
- en cas de doute sur le caractère licite d'une campagne, se rapprocher de l'ANJ lors de la conception de la communication ;
- ou encore, après leur diffusion, transmettre à l'ANJ une évaluation quantitative et qualitative de l'impact des communications sur les objectifs de prévention du jeu excessif et de protection des mineurs.
Mais le régulateur, qui dispose de pouvoirs élargis depuis l'an dernier (par exemple un pouvoir de retrait à l'encontre d'une campagne qui inciterait au jeu des mineurs ou comporterait une incitation excessive à la pratique du jeu), entend aujourd'hui pousser le curseur un peu plus loin à la lumière des enseignements de l'Euro. "Cette compétition a souligné l'existence de pratiques contestables autour du pari sportif", estime l'ANJ avant d'évoquer "le matraquage publicitaire, le ciblage des jeunes ou la stimulation excessive du jeu".
Ce 20 juillet, l'autorité a donc réuni les opérateurs du marché français avec l'ambition d'établir un plan d'action. Les échanges se seraient à cette occasion avérés constructifs, les opérateurs s'accordant "sur la nécessité de procéder à un rééquilibrage de leurs pratiques afin de préserver le modèle récréatif du marché français des jeux d'argent". Sur cette base, cinq chantiers ont été ouverts avec l'objectif de donner des résultats d'ici la fin de l'année :
Le plan d'action de l'ANJ
En matière de publicité
- réalisation par les opérateurs d'un bilan à mi-parcours des ajustements réalisés suite à la communication de janvier (avec possibilité pour l'ANJ d'engager des procédures de sanction en cas d'insuffisances) ;
- réalisation par l'ANJ à la rentrée d'une consultation sur le thème de la publicité, laquelle pourrait déboucher sur de nouveaux outils d'intervention ;
- engagement d'une collaboration avec l'ARPP pour des lignes directrices précises en matière de publicité.
En matière de gratifications commerciales
- réalisation d'une analyse détaillée des pratiques en France et en Europe, avec in fine la possibilité d'un renforcement de l'encadrement des offres.
En matière d'identification et d'accompagnement des joueurs excessifs
- organisation d'un séminaire, le 21 septembre, "afin de s'accorder sur une définition commune et robuste du jeu excessif ou pathologique qui servira de référentiel à l'ensemble des acteurs".
En matière de limitations des mises
- suite à la décision du Conseil d'Etat du 24 mars, réalisation par l'ANJ d'une revue approfondie des conditions générales d'utilisation proposées par les opérateurs ;
- adoption en septembre d'une délibération encadrant plus strictement les limitations de mises, avec in fine la possibilité de sanctions.
En matière de tipsters
- saisine en cours des autorités administratives et judiciaires compétentes à propos des pratiques commerciales trompeuses de certains sites de pronostiqueurs ou tipsters.
Isabelle Falque-Pierrotin, Présidente de l'ANJ
L'Euro de football a eu un effet décapant extrêmement utile car il a mis en lumière et questionné des pratiques problématiques pour les paris sportifs que l'ANJ avait identifiées pendant cette première année d'existence. Il n'est pas possible de faire croire aux jeunes que l'on peut gagner facilement de l'argent en pariant ! Consciente des risques que la situation actuelle fait peser sur la protection des joueurs, elle veut y répondre de façon résolue et efficace avec un plan d'action qui se traduira rapidement par la clarification des règles applicables, la proposition éventuelle de nouveaux outils d'intervention et des actions de contrôle ou de sanction renforcées.
434 millions d'euros de mises en ligne, 22 millions d'euros de mises par match de l'équipe de France... Pas de doute : l'Euro de football fut bien un énorme carton pour les opérateurs de paris sportifs. Ces derniers ont toutefois droit aujourd'hui à un retour de bâton : l'Autorité Nationale des Jeux (ANJ) déclare vouloir "réduire drastiquement et immédiatement la pression publicitaire en faveur des paris sportifs".
[...] Lire la suite…
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